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L’insubmersible Tshisekedi veut réaliser son rêve


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Source: LE SOFT INTERNATIONAL

-On le croyait immergé à jamais, le Sphinx de Limeté est de retour.Tshisekedi sent son heure venir. Après avoir fait l’essentiel de sa carrière politique au service du pouvoir de Mobutu avant de le combattre farouchement au début des années 80 – tout comme les régimes politiques qui lui ont succédé -, le nationaliste irrédentiste Étienne Tshisekedi wa Mulumba est aujourd’hui, officiellement, candidat à l’élection présidentielle de 2011. Une étape importante dans la vie de cet homme qui, après avoir lié son sort avec le destin, est en passe d’avoir son rendez-vous avec l’histoire.

Le sphinx de Limeté – du nom du quartier où il réside – est-il réellement prêt pour le grand soir? Lui qu’on avait de la peine à imaginer qu’il se remettrait de sa maladie; lui qui, il y a peu, était donné pour mort; lui qui a connu l’embastillement, la relégation, l’humiliation, la torture. De toutes les épreuves, il n’a fléchi un seul instant dans son combat pour le changement, l’État de droit et la démocratie en R-dC. Le lider maximo de l’UDPS est toujours resté droit dans ses bottes, requinqué par les aller-retour de l’histoire r-dcongolaise. Jusqu’où ira Étienne Tshisekedi?

Pour espérer l’emporter un jour, lui, le nationaliste, a tout revu à la baisse: il joue désormais avec les capitales occidentales…

Lors du premier congrès de l’UDPS (Kinshasa, 10-14 décembre 2010), Étienne Tshisekedi wa Mulumba, reconduit dans ses fonctions de président national de ce parti et désigné comme son unique candidat à l’élection présidentielle de 2011, n’a donné qu’une seule consigne à ses partisans: «Battez-vous jusqu’au bout pour que cela se concrétise (en clair, que le peuple l’élise président de la République)».

Le 8 décembre 2010, son retour au pays secouait le monde politique r-dcongolais. Le président national de l’UDPS, l’opposant historique, était accueilli en grande star par ses partisans. Le jour même où le Chef de l’Etat venait de faire un discours au congrès sur l’état de la nation.

Pour ses partisans, le retour annoncé du sphinx de Limeté – personne énigmatique figée dans une attitude mystérieuse – avait des relents de revanche – en témoigne cette démonstration de la mobilisation tous azimuts dont seule l’UDPS détient le secret – pour son parti mais aussi pour l’opposition dans son ensemble qui a de la peine à prendre ses marques après l’hibernation de Tshisekedi pendant ces 3 dernières années.

À 78 ans, après avoir quitté la scène politique pour des raisons de santé, Tshisekedi se payait ainsi avec sa rentrée politique le luxe de contrarier les plans du camp présidentiel mais aussi de l’opposition. Trois ans après son hibernation forcée, Tshisekedi, le radical, l’incorruptible, Moïse le libérateur, comme on aime à le définir, étiqueté socialiste, semble avoir retrouvé ses marques au point que, de l’avis des observateurs, l’opposant intransigeant s’est bonifié au fil de l’âge et des événements.

«Très souvent, ceux qui ont lié leur sort avec le destin, ont fini par atteindre leur but, affirme un proche de l’intéressé. L’exemple de Nelson Mandela qui a combattu le régime de l’apartheid en Afrique du Sud, et récemment d’Alpha Condé qui a combattu la dictature avant de devenir président de la Guinée est là pour nous édifier. L’un et l’autre ont connu la prison, l’humiliation, etc. Comme eux, Tshikas a été embastillé, relégué dans son village natal, humilié, torturé. On l’a même déclaré fou sous le régime Mobutu… Pensez-vous vraiment que son passé n’aura été qu’inutile?»

Le «martyr» d’Étienne Tshisekedi commence le 17 janvier 1988. Son meeting téméraire au Pont Kasa-Vubu, interrompu, aura été le départ de son destin national. Tshisekedi fit preuve d’un courage politique exceptionnel. Nul, à l’époque, n’avait droit à la parole, sauf à faire l’éloge du MPR Parti-État.

IL S’ÉTAIT DEJA AUTOPROCLAMÉ PRÉSIDENT LA RÉPUBLIQUE.
L’opposant quittera la tribune sous une pluie battante des matraques de la «police» politique mobutienne, le visage tuméfié, la chemise ensanglantée, le corps quasiment soulevé de terre et les pieds branlant sous l’emprise de deux mains de fer le prenant par la ceinture. Pont Kasa-Vubu reste pour Tshisekedi le déclic qui renversa le leadership à la tête de l’UDPS pour imposer son charisme comme le premier parmi ses pairs fondateurs du parti en 1982.

Avant cette date, Tshisekedi n’avait de notoriété que celle de tout le groupe, respecté pour avoir osé dire non à Mobutu, tout haut. Il assume alors les fonctions de secrétaire national chargé de l’organisation dans un exécutif conduit par Frédéric Kibassa Maliba. Ceux qui pèsent le plus sont Ngalula Pandanjila et Anaclet Makanda Shambuyi, la tête pensante depuis la publication de la lettre des 13 parlementaires en 1980. Tous voient le grand destin de Tshisekedi commencer à se dessiner à partir de 1987.

C’est cette année qu’a été conclu l’Accord de Gbadolité entre Mobutu et les ténors de l’UDPS. Les seconds ont renoncé à l’idée de faire de l’UDPS un parti politique à part entière pour réintégrer le MPR comme un courant contre la concession de l’autre partie de remettre ses opposants aux affaires. Ils n’avaient presque plus le choix, éprouvés par de longues années de persécution, doublée de relégation dans les pires conditions de vie.

La plupart seront nommés au Comité central du MPR. Kibassa, lui, entre au gouvernement comme ministre de la Jeunesse, des Sports et des Loisirs. Un poste clé pour le régime mobutiste basé sur la «propagande». Quant à Tshisekedi, il est rentré bredouille de Gbadolité, sinon avec la promesse d’une nomination comme premier commissaire d’État, selon des sources qui démentent l’assertion selon laquelle Tshisekedi avait rejeté toute offre de Mobutu.

Toujours est-il que Tshisekedi quitte le pays quelque temps après au lieu de jouir avec ses camarades de lutte du remariage avec Mobutu. À Bruxelles, il tombe face à une diaspora pro-UDPS très hostile à l’accord signé avec Mobutu. Ici, les gens ont le moral. De ne pas partager la douleur morale et physique que vivent les fondateurs de l’UDPS sur place à Kinshasa leur donne la force d’exiger de tenir encore.

Des États-Unis où il s’est exilé, le professeur Marcel Lihau abonde dans le même sens. Voilà donc Tshisekedi investi de la mission de sauver la maison UDPS après avoir pris lui-même part à la grand-messe de Gbadolité. L’idée première est de mettre Mobutu à l’épreuve. S’il a donc accepté de reconnaître à l’UDPS la place d’un courant dans le MPR, c’est qu’il ne s’irritera pas que la même UDPS exprime ses opinions en public.

Depuis le meeting du Pont Kasa-Vubu, tout allait s’enchaîner pour faire de Tshisekedi la fin et le commencement de l’UDPS. Mais aussi le symbole du changement dans le pays. Il l’est encore plus aujourd’hui, même si des rumeurs continuent à courir sur son état de santé. Malgré l’âge, le mystère Tshisekedi reste plein et entier.

«L’homme n’a pas changé, on est toujours en face du Tshisekedi de l’époque de Mobutu, considéré à tort comme un homme ayant une très haute opinion de lui-même», souligne un Tshisekediste de première heure. Depuis le début de son combat politique, il stigmatise toujours la persistance des «antivaleurs» qui gênent dangereusement la marche vers l’État de droit.

Par exemple, le 2 avril 2005, dans son discours prononcé à l’ouverture d’une session du comité national (parlement) de son parti, il déclarait: «Il est désagréable de constater la dégradation de la situation et la persistance des maux décriés à la Conférence nationale souveraine. Nous lançons un appel solennel à nos compatriotes d’entamer dès ce jour une lutte implacable contre les tares qui retardent notre développement, et notamment: la corruption, le clientélisme, le pillage des ressources nationales, l’aliénation du portefeuille de l’État».

Ou encore: «Le fonctionnement de nouvelles institutions politiques à mettre en place après la transition doit permettre de protéger les biens et les personnes, pour créer les richesses, accroître la valeur ajoutée, améliorer la situation socio-économique, réduire la pauvreté de la population. Il est unanimement reconnu que notre pays regorge de ressources immenses. Cependant, depuis l’indépendance, le peuple congolais croupit dans la misère la plus noire, suite principalement à la mauvaise gouvernance, à l’absence de moralité et à l’impunité généralisée. Ces immenses richesses, nous devrons les partager avec les autres nations du monde au travers des partenariats équitables…».

Le combat politique de Tshisekedi et le projet de société de l’UDPS visent le progrès social, à côté de la démocratie. L’illustration sera donnée le 9 juillet 2005. Tshisekedi s’autoproclame «Président la République» devant des dizaines de milliers de manifestants. Une véritable démonstration de force lors de son meeting au stade Tata Raphaël.

Plus de 50.000 manifestants venus de tous les coins de la ville de Kinshasa. L’historique opposant en avait bien besoin dans sa quête de se présenter en interlocuteur incontournable face au régime 1+4. Nul doute que ce coup l’avait remis en selle au lendemain d’un succès mitigé à son mot d’ordre d’arrêt de la transition post-Dialogue intercongolais, le 30 juin 2005.

«Vous avez fait un vote essentiel pour l’avenir de notre pays. Je prends solennellement acte de votre demande. À partir d’aujourd’hui, je promets de me comporter en conséquence», a décrété Tshisekedi en réponse à la clameur de la foule l’investissant à la tête du pays.

Cependant, la mobilisation massive des Kinois pour le recensement électoral en 2005 – malgré l’appel au boycottage lancé par l’UDPS – a été un échec pour Tshisekedi. Nombre d’observateurs ont eu bien du mal à comprendre la stratégie de l’UDPS. En effet, son chef semblait rechercher l’instauration d’un climat délétère alors qu’il avait apparemment tout à gagner de la tenue d’élections régulières.

Les sondages de l’époque le donnaient en tête dans les intentions de vote en cas de scrutin présidentiel. Reste que l’UDPS, donc Tshisekedi, n’a toujours pas reconsidéré sa position de faire cavalier seul. Ceux qui ont voulu faire savoir leur choix de soutenir la candidature de Jean-Pierre Bemba au second de l’élection présidentielle contre Joseph Kabila, en ont eu pour leur grade. Des exclusions s’en sont suivies contre tous ceux qui ont battu campagne ou pris position publiquement pour Bemba.

Mukoka, Diayikwa, Bomanza, Dindo, Bazaïba et consorts. Les dernières exclusions massives de plus d’une centaine des cadres tshisekedistes ont occasionné de graves dissensions au sein de l’UDPS. Et aussi, une sorte de tâtonnement, faute d’avoir levé de nouvelles orientations après la reconfiguration politique consécutive à la tenue des élections. Tshisekedi, lui-même, s’en est montré embarrassé. Nombreux ne voyaient l’issue que dans la convocation d’un congrès.

Tshisekedi a souvent été au centre de controverses. La plus sérieuse naît sans doute en 1991, lorsqu’il est élu premier ministre à la Conférence nationale souveraine présidée par l’actuel cardinal Laurent Monsengwo Pasinya. Malgré les vicissitudes, le combat de Tshisekedi est demeuré constant. L’homme veut changer la R-dC à son image, prouver que son combat pour un État de droit n’a pas été vain. Il a toujours voulu moraliser la vie publique d’un pays déjà rongé par le «mal zaïrois».

Au nom de la morale et du droit, l’audace de Tshisekedi frappe l’opinion, marque les esprits. Mais ses adversaires n’y voient qu’arrogance et suffisance : Tshisekedi est un maniaque de l’autorité, de l’ordre et de la discipline. En fait-il un peu trop ? La constance est une qualité qui fait défaut à la classe politique r-dcongolaise. Tshisekedi, lui, n’a jamais trahi ses idéaux. «Par le passé, beaucoup se sont servi de nous comme marchepied.

C’est normal que nous soyons prudents», déclare Joseph Kapika. Même au sein de son parti, Tshisekedi est resté intransigeant, ne tolérant aucun déviationnisme. Il a vu venir et a fini par reprendre lui-même les choses en main jusqu’au premier congrès de son parti.

Qui révèle une autre image de Tshisekedi: rassembleur. En effet, il a décrété l’amnistie pour tous les membres de l’UDPS afin de rétablir la cohésion dans son propre camp déchiré. Et il a lancé des signaux d’apaisement en direction de l’opposition.

Mais qu’y a-t-il derrière cette métamorphose? Tshisekedi veut voir le changement s’installer en R-dC, montrer qu’il est le seul à pouvoir conduire ce pays vers l’État de droit, le progrès et la démocratie. Cela passe par la conquête du pouvoir par les urnes. D’où son appel à la mobilisation générale pour que le rêve devienne une réalité en 2011. Des sources affirment que n’eût été l’intransigeance de Valentin Mubake, Tshisekedi allait concourir à la présidentielle en 2006.

Les cadres de l’UDPS ont apparemment tiré les leçons du passé et sont décidés d’amener le parti aux élections à tous les niveaux en 2011. Le congrès de l’UDPS a donc balisé la voie. Il a été perçu comme le seul cadre susceptible d’amener à la refondation d’un parti historique qui n’arrive toujours pas à faire aboutir sa lutte après plus d’un quart de siècle de vie. Ce congrès a créé soi-même les conditions d’un rebond. L’accueil triomphal que son armée de parlementaires lui a réservé prouve que le lider maximo reste le maître.

La réalité qui se pose en même temps qu’elle s’oppose à l’UDPS est que les R-dCongolais ne cherchent qu’à voir leur sort s’améliorer. Pour l’instant, il semble plus difficile d’en savoir un peu plus sur leurs intentions de vote. Ce qui laisse penser qu’on tend vers une campagne électorale très mouvementée. C’est sûr: c’est «l’ultime combat», le quitte ou double pour un Tshisekedi encore combatif malgré ses 78 ans.

Longtemps, il a attendu que le destin vienne à lui. Cette fois-ci, c’est lui qui est contraint d’aller vers le rendez-vous avec l’histoire. Même s’il doit revoir à la baisse ses convictions de nationaliste irrédentiste, allant jusqu’à frapper à la porte d’un Sarkozy. Ce que nul n’aurait imaginé…

TSHIMANGA DOLAY